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NUMÉRO 16

ILLUSTRATION FÉMININE AU QUÉBEC
L’univers des arts est en transformation depuis l’arrivée du iMac. Le domaine de l’illustration est chamboulé.Il n’y a pas encore si longtemps, on se demandait si un dessin fait à l’ordinateur était vraiment de l’art. Cette époque est révolue. Poser la question aujourd’hui, ce serait l’équivalent de porter un col roulé beige, magnifique sur Steve McQueen, mais anachronique sur le dos de votre nouveau chum. On assiste, au Québec, depuis une dizaine d’années, à un bouleversement dans le domaine des arts graphiques. Une nouvelle forme de vivacité et d’inventivité se remarque partout. Cette transformation est due en partie à l’infiltration d’un bon nombre d’élèves des beaux-arts et du domaine littéraire dans l’univers de la publicité. Les arts graphiques sont bien nourris aujourd’hui. Cette forme d’art, qui se soumet aux impératifs du marché, démocratise l’appréciation artistique et permet au moins aux intéressés de dénicher des boulots lucratifs et d’entreprendre une carrière internationale. Il est possible d’être un artiste et de ne pas perdre son âme dans ce domaine. Je pense ici à Vittorio Fiorucci, illustrateur féroce, imposant sa loi, et enterré cet été au cimetière de la Côte-des-Neiges, près de la grille, d’où il entend certainement d’outre-tombe le bruit des voitures qu’il aimait tant collectionner. Il se disait affichiste et non pas artiste peintre, mais il a offert au public, tout au long de sa vie, des œuvres cohérentes, inspirées des futuristes italiens. Vittorio était intemporel, et aux abrutis qui lui demandaient de changer un trait à ses compositions, il répondait : « Est-ce que tu dis à ton comptable comment compter ton argent ou à ton médecin comment opérer ton hernie ? » Les préceptes mêmes du Manifeste du futurisme (1910) étaient inscrits dans son ADN. Aujourd’hui, une nouvelle génération d’illustratrices révèle chaque jour ses talents. Nous avons choisi 16 jeunes femmes qui frappent depuis quelques années notre imaginaire en raison de leur nouveauté. Elles forment nécessairement une avant-garde, car ce sont les pionnières du mariage indissoluble de l’art et de l’ordinateur personnel. Elles sont futuristes sans le savoir. Elles travaillent à une version pixélisée de la beauté par la décomposition chromatique et l’interprétation des volumes. Mais surtout, car elles travaillent parfois en publicité, dans le domaine de l’emballage et du design, elles contribuent à rendre notre environnement de tous les jours plus harmonieux).